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Jean-Mi
Posté par Jean-Mi
le 23/02/2010

Michel Merlen ou la poésie comme quittance du vivre

1. Bibliographie

Michel Merlen

Michel Merlen est né en 1940 à Hyères. Il a collaboré à de nombreuses revues, dont Foldaan où il a publié d'importants dossiers concernant les peintres contemporains : Ogier, Ipoustéguy, Rancillac, Schlosser… Il se consacre actuellement à la rédaction d'un récit autobiographique.

Il a publié les livres suivants :

  • Les fenêtres bleues, Prix jeune poésie, Hyères, 1969.
  • Fracture du soleil, éd. La Grisière, 1970.
  • Les rues de la mer, éd. St-Germain-des-Prés, 1972.
  • La peau des étoiles, id., 1974.
  • Quittance du vivre, éd. Possibles, 1979.
  • Abattoir du silence, éd. St Germain-des-prés,1982.
  • Poèmes arrachés, éd. Le Pavé, 1982.
  • Made in Tunisia, éd. Polder, 1983.
  • Le désir dans la poche revolver, éd. Le Pavé, 1985.
  • Terrorismes, éd. Polder, 1985.
  • Généalogie du hasard, éd. Le dé bleu, 1986.
  • Borderline, éd. Standard, 1991.

Anthologies :

  • La nouvelle poésie française, éd. Seghers, 1977.
  • Cent poètes pour jeunes d'aujourd'hui, éd. Le Cherche-Midi, 1980.
  • Les poètes de l'émotion, éd. La Pibole, 1980.
  • Le père, éd. Le cherche-Midi.
  • Panorama de la poésie contemporaine, Université de Dijon.
  • Les poètes et le vin, éd. Le Pavé.
  • Génération Polder, éd. La Table Rase.
  • Les poètes de l'année 2005, éd. Seghers.

2.

Dès que l'ennui tourne le dos, je rejoins quelques êtres et lieux de ma micromythologie, certains parcours tirent toutes les courtes pailles du rituel, les rues infatigables. Le regard picote les lumières et les rapines à venir.

Années 80. Presque chaque semaine, avant le rendez-vous au Pont de l'Epée, j'inspecte mes librairies. Chez Oterello, surréalisme, livres précieux, espèce protégée. Emiettant mille minuties, le propriétaire m'accorde le privilège de feuilleter l'édition originale de La sauterelle arthritique. Mine de masque au mur, André Breton, les yeux fermés, protège les bonds, les souffrances ironiques de la petite Gisèle. Au Partage des eaux Alex a sauvé de la noyade deux exemplaires de Poètes d'aujourd'hui: Roger Gilbert-Lecomte et Saint-Pol-Roux patientent au sous-sol. Se sont-ils compris? Dans la vitrine de Tshann le reflet d'Yves Martin ricane à l'infini. Aucun doute, le petit jour a fait bouillir son vin. Quelques restos, quelques cafés plus loin, L'oeil écoute. Sous surveillance du cyclope claudelien, je maraude dans les oeuvres complètes de Marcel Aymé -cuir bleu- illustrées par Topor, lequel , tombé amoureux de la Vouivre, laisse l'inspiration se balader pieds nus dans la sinuosité des vipères.

Mais l'inspection la plus longue, celle qui exige la patience méticuleuse de démineur, m'attend rue du Cherche-Midi, à la librairie des éditions du même nom, qui abrite également les publications des éditions Saint-Germain-des-Prés. Dans les rayons, des milliers de recueils se blottissent comme des orphelins; mais l'expérience instruit la méthode: je n'effectue mes prélèvements que dans la contexture des collections Poètes contemporains, Haut langage, Poésie pour vivre, Blanche. Les autres étiquettes constituent l'immense quantité négligeable des victimes de la flibuste. J'ai ainsi lié connaissance avec Alain Morin, hallucination errante; Jocelyne Curtil au point de non retour; Daniel Biga, le volatile Mohican; André Shmitz, dompteur d'éclairs rapaces; tant d'autres…Cette fois, c'est La peau des étoiles qui attire mes doigts. Auteur: Michel Merlen. Je lis: "Les femmes sont des puits où je n'ose descendre / pourtant d'elles montent des enfants"… Ecriture autodéfense, vers atémis; le titre ne ment pas : trouver les mots pour soulager l'épiderme à vif des lueurs trop lointaines.

Michel Merlen incarne par excellence le poète tel que l'envisageaient Jean Breton et Serge Brindeau, en 1964, dans Poésie pour vivre (Manifeste de l'homme ordinaire): "La vie ordinaire devient trop enlaçante pour qu'on la néglige, c'est elle que nous inscrivons." Mais aussi: "Le langage à son tour irrigue le monde qui l'a fait naître, il exprime comme il peut le "réel", mais il le transforme, et cette métamorphose paraît plus vraie que l'expérience primitive… Que votre écriture soit aussi insolite et contradictoire que la magie ordinaire…" Il ne s'agit donc pas d'énoncer banalement la banalité; pour ça, nul besoin de poètes. Il se trouve pourtant des escouades d'auteurs qui, semble-t-il, ne retiennent que la première phrase de l'extrait cité plus haut. Aussi une multitude de textes indigents, sous couvert de "lyrisme ordinaire", ont-ils été promus poèmes, quand bien même ils se satisfont de traînasser au ras - pas même des pâquerettes.

Le quotidien, l'ordinaire, certes, mais en perpétuel mouvement avec l'imaginaire, la colère, l'émerveillement, la violence, l'amour… et surtout, surtout: le style. Celui de Michel ne saisit la banalité, le "jour le jour", que pour en révéler le chant, "l'absence absolue de frontières", blues , souvent, du temps rauque, déréliction nomade qu'éclairent fugitivement la beauté féminine ("Je veux qu'on le sache / j'ai de l'admiration pour tout ce qui est vivant / pour le pain chaud de tes cuisses / les fraises de ton sexe…"), la mer en marées-marelles d'enfance, le génie de certains lieux: Hyères, la Tunisie, quelques dédales parisiens (" Je n'étais pas encore blessé à mort quand j'étais à Tunis, à Hyères, à Port Cros"). La blessure originelle: l'abandon. Fils de l'absence, mère "made in America", Michel sait que la plaie ne cicatrise pas, elle saigne ailleurs, et l'âme se heurte au front du père - qui aurait voulu écrire - ("ils n'ont pas voulu / ni te tuer ni que tu vives / ils ont fait l'amour mal / le hasard d'une naissance s'est levé.").

L'Algérie, la guerre, douleur, cette fois, de toute une génération (Venaille, Laude…) au cœur des trente - pas si "glorieuses" qu'on l'affirme. Désertion, prison des Baumettes, régiment disciplinaire. Michel, refusant de tuer, sortait avec son arme, mais sans cartouches. Déserteur de l'odieux, il le reste, il faut échapper aux constrictions du temps, respirer enfin à pleins regards, capter le hasard au lisse d'une épaule, les coïncidences fondantes, l'instant va-nu-pieds; sûr, au bas du boulevard, s'ouvre le passage vers les rues de la mer. Poète marcheur, il ne débusque pas le pittoresque comme le piéton de Paris; s'il y a connivence avec Fargue, c'est la haute solitude. Celle-ci ne s'élève pas sans risques ("je sors des hôpitaux / pour me soigner / au vent cinglant des villes…je ne sais pas pourquoi je marche"), l'identité menace dissolution, les particules de soi sont hautement instables, l'abattoir du silence attend froidement l'aboiement muet de qui l'homme en blouse blanche prend la main, sans lui dire bonjour. Michel ne camoufle pas, ne maquille pas les paupières tremblantes; sa poésie, comme celle de Chambelland, n'hésite pas à dénuder le noyau, comme celle de Delbourg où xanax peut rimer sans remords avec Astyanax. Alors la violence s'impose, vitale. Mais peu de rapports avec les incantations somptueuses d'Artaud, l'humour désarticulé d'un Michaux désespérément jubilant. Michel, dans la tiédasserie qui en ces temps s'impose, s'accorde le luxe d'être une violence modeste.

"Il te faut créer pour te faire entendre". Le verbe entendre occupe tout son sens, l'auditif comme simple médium de comprendre, puis d'aimer, non d'amour mesquin et possessif, retranché, mais celui de faire corps avec tout ce qui palpite: les galets mouillés par le large attestent l'été des corps, les trottoirs pluvieux des villes reflètent l'urgence des rencontres, ça clignote le vertigineux, pendant que, plus tôt, plus tard, ou simultanément, "le beau temps tient / grâce au sourire des passantes." Le jeune homme - non sans anxieuse pudeur - déboutonne son gris, parce que les mots l'ont retrouvé. Alors, vite, écrire, le langage prouve la présence, comme les traces de lynx dans la neige.

Si j'étais sérieux, rationnel, exégète, j'établirais le corpus des poèmes de Merlen où, de toute évidence, l'altérité fusionne avec le mystère d'être soi, unique (sans propriété, contrairement à Stirner). Mais je ne suis pas très méthodique. Je me laisse aller à repérer une généalogie du hasard, et je ne vois -si je m'en tiens à la poésie contemporaine - qu'un seul cousin par alliance de Michel Merlen: Gérald Neveu, qui, tout simplement, espérait: " dans la nuit de la nuit / faire pousser une autre nuit / à grands coups de tête."

Jean-Michel Robert

P.S. Pour lire quelques poèmes de Michel Merlen, il suffit d'aller au 9 octobre 2008 de mon blog (ou catégorie "comme ça, juste pour le plaisir"), ou plus simplement, taper le nom de ce poète sur la recherche Google.

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