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> … > Poètes contemporainsPaul Vincensini

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Jean-Mi
Posté par Jean-Mi
le 04/10/2010

1. Biographie

Paul Vincensini (1930-1985), "Archiviste du vent", éd le Cherche-Midi.

Paul Vincensini

Stupeur du regard paumé dans la vie quand l'avenir se dérobe et la mort chatouille les pieds. Paul Vincensini, en textes souvent très courts peuplés d'êtres fragiles au destin boiteux, exprime son vertige face au « gros Néant niant niant », sa déception essentielle (« TENDRESSE : Reste à savoir / lequel des deux est le plus tendre / lequel des deux / ne mangera pas l'autre"), son immense fatigue de vivre par l'absurde ("Moi / Comme un cheval très fatigué / Qui voudrait / (Mais ce n'est pas possible) / Poser sa tête / Contre le cou d'une colombe"). Tout cela pourrait tomber dans le pathos, mais Vincensini est un grand poète du comique et de l'humour, son langage, parfois « terroriste » ("-Lo to folo lo toto. ? Ko ? Ko ?Ko ? Ko lo folo ?..."), révèle du sourire jusqu'au fou rire de la mélancolie. La tendresse tout en pudeur qui, malgré tout, résiste, le rire qui ne se « démonte » pas devant le malheur me semblent pouvoir faire justice de la réputation d'austérité que traîne trop souvent la poésie. "Archiviste du vent" regroupe l'essentiel d'une œuvre dont la relative minceur occupe une bonne place entre celles de Tardieu et Dubillard.

Je n'ai rencontré Paul Vincensini qu'une fois, à la librairie Le Pont de L'Épée. Guy Chambelland a fait les présentations. J'étais étonné car j'avais imaginé un homme au regard, au sourire malicieusement lisibles entre les rides. Pas du tout : sérieux comme le chef de service d'une administration oubliée. De sa grosse serviette, il a sorti "Toujours et Jamais", brève anthologie de son oeuvre éditée sous l'étrange label "Culture et Pédagogie". Il me l'a dédicacée, signature mêlée au dessin de deux petites casquettes. J'étais ému à la mesure de la jubilation éprouvée à chaque lecture de ses poèmes. Et je m'en veux ce matin de ne pas retrouver ce livre perdu dans mon vaste bibliofoutoir.

2. Choix de poèmes

TOUJOURS ET JAMAIS Toujours et Jamais étaient toujours ensemble Ne se quittaient jamais On les rencontrait dans toutes les foires On les voyait le soir traverser le village Sur un tandem Toujours guidait Jamais pédalait C'est du moins ce qu'on supposait Ils avaient tous les deux une jolie casquette L'une était noire à carreaux blancs L'autre blanche à carreaux noirs À cela on aurait pu les reconnaître Mais ils passaient toujours le soir Et avec la vitesse... Certains les soupçonnaient Non sans raison peut-être D'échanger certains soirs leur casquette Une autre particularité Aurait dû les distinguer L'un disait toujours bonjour L'autre toujours bonsoir Mais on ne sut jamais Si c'était Toujours qui disait bonjour Ou Jamais qui disait bonsoir Car entre eux ils s'appelaient toujours Monsieur Albert Monsieur Octave * DES PANIERS POUR LES SOURDS Je n'ai jamais revu cet enfant silencieux Qui se lavait les yeux La nuit Dans les rivières Je ne l'ai pas revu Et ses amies les pierres Ne m'ont rien dit tout bas Il est près de la mer Et s'est crevé les yeux Il sort la nuit dans les clairières Et tisse avec ses paupières Des paniers pour les sourds * EPOUSE TA PARESSE Ce sont les pierres noyées Les racines les souliers Les vieux bidons rouillés Qui feront chanter la rivière Sois comme elle Epouse ta paresse Ne chante pas Sois (si tu le peux) Chanté * AMOURS AMOURS C'EST BIEN TOUJOURS LA MÊME MUSIQUE Ce long bruit de baiser Goulu et sonore Que fait en se vidant Le bidet * Les cailloux Me parlent Avec de l'ombre plein la bouche * D'HERBE NOIRE J'avais cueilli des fleurs pour traverser la mer Mais j'ai dormi près de l'étang Au milieu des chevaux Et l'aurore emprisonne mon bouquet d'herbe noire Je suis maintenant étendu sur le sable Je ne pars plus Je suis un petit aveugle Et j'ai tout un coucher de soleil sur les jambes * T'es fou ! Tire pas ! C'est pas des corbeaux ! C'est mes souliers ! Je dors parfois dans les arbres * Dans les chambres grises Dans les chambres bleues Dans les chambres ombreuses On fait du canot L'ombre des chambres est douce Aux navigants heureux Les arbres penchés sur eux Les algues dans leur sillage C'est leurs bras c'est leurs jambes C'est leurs cheveux C'est dans leurs propres yeux Qu'ils nagent * EN SILENCE Les insectes font leurs petits bruits Et leur petite farine Dans le creux des pierres Le temps passe Me passe S'entasse tout autour de moi Je continue à dire j'ai tout le temps Mais je ne peux plus bouger Je voudrais tricoter Des gilets pour les arbres * PETITE NUIT Quand il fait nuit La nuit se prend dans ses bras Et dort sur son épaule Comme un lilas * Je ne suis pas si fou De demander l'heure à mon chien Mais regardez Regardez donc Où mettrait-il sa montre Il n'a pas de poche Le pauvre à son gilet * JE NE SAIS PAS Je ne sais pas ce qui naîtra de mon ombre Si elle est le terreau ou la graine Si je suis un semeur ou un fossoyeur Ni si le champ existe Mais je sais Et c'est tout ce qui m'attriste Qu'on ne sème pas dans les rivières Ni les fenêtres * CALCULATEUR Je compte les jours Sur mes doigts J'y compte aussi mes amis Mes amours Un jour Je ne compterai plus que mes doigts Sur mes doigts * L'HIVER EST EN NOUS, MES DOUX ENFANTS, OUI, EN NOUS Cette cul de buée Sur cette fumier de vitre M'empêche de voir ces grands cons d'arbres * C'EST COMME SI Arrêtez-vous Un cheval trait un arbre Dans l'escalier Ce n'est pas vrai C'est un chat mort Qui dégringole Et joue à la balle Dans l'escalier Assez joué À déranger le jour sombre des choses L'escalier boit un arbre À la table du chat Accoudé tête basse J'étais là Sans y être Et sans n'y être pas * LE SERPENT C'est un serpent sans tifs Pensif et sans chien Qui s'en va à la chasse À la chasse à rien Mais moi qui suis plus malin Je reste à la maison Les pieds dans les tisons Qui s'attisent et s'excitent En sifflant La chanson du serpent sans tifs Pensif et sans chien Qui revient de la chasse De la chasse à rien Toutes ses mains dans les poches Et la queue entre ses dents * L'OUVRIER ET LA MORT Quel est cet homme vêtu de bleus d'ouvrier Qui avance vers une maison blanche Mon Dieu c'est moi Ce n'était pas un ouvrier. La maison blanche mon Dieu n'est pas terminée Et il a posé sa veste dans l'entrée. Puisqu'il n'est pas ouvrier Et qu'il a posé sa veste dans une maison incomplète Mon Dieu c'est qu'il est mort. Peut-on s'étonner alors Que les murs de la maison soient des miroirs Qu'il les ait tous brûlés. Mais on ne peut pas mon Dieu brûler les miroirs . * LO TO FOLO - Lo to folo lo toto. - Ko? Ko? Ko? Ko lo folo? - Lo toto. - Oh! Lo lo! Toto lo toto? - Toto! Lo to folo Mo lo po fo do miotto. Traduction littérale: Il a tout fêlé la tête. / Quoi ? Quoi ? Quoi ? / Quoi il a fêlé ? / La tête. / Oh ! là là ! / Toute la tête ? / Toute ! / Il l'a toute fêlée / Mais il n'a pas fait de miettes. N.B. Tous les O de ce poème sont des O fêlés c'est-à-dire ouverts.

3. Commentaires (5)

dahliane
Posté par
le 01/02/2011
C'est une histoire de "rien" qui m'amène ici. Tu me fais découvrir Paul Vincensini, enfin. Merci. Ne me réponds pas "de rien".
On'X
Posté par
le 27/06/2011
Merci pour ce partage d'une drôle de tendresse
Posté par
le 28/06/2011
super auteur
bravo

Toujours n'avait point recourt
et Jamais ne se trompait
silverfox199
Posté par
le 01/09/2011
Textes inspirant d'une infinie justesse
Sur un monde de l'absurde en liesse
Merci merci de ce partage manifeste
Que je commente avec maladresse

Ghjslain
Posté par
le 23/10/2011
Beaucoup de recherche et de tendresse. Un monde fou que j'aimerais connaître.
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